Les tirailleurs sénégalais du 11ème Cuir
1. Le contexte historique.
11 La détention à Lyon.
En 1944, la 65ème Compagnie Sénégalaise (*) du GMICR n°5 (Groupement Militaires d’Indigènes Coloniaux Rapatriables) comptant 165 militaires était cantonnée à Lyon au camp de la DOUA. Elle était composée de soldats africains de tous horizons qui avaient été regroupés en attendant un éventuel rapatriement en Afrique . Ses membres, prisonniers de guerre depuis l’occupation par les Allemands, étaient enfermés la nuit et soumis le jour à des travaux forcés, notamment au port de La Mulatière. Mal nourris, ils supportaient difficilement ce traitement et parmi eux nombreux étaient ceux qui souhaitaient rejoindre la Résistance….
12 Les Sénégalais rejoignent le maquis du Vercors
La Résistance ayant pris contact avec le Sergent VILCHEZE, cadre européen de la Compagnie, une opération fut montée depuis le Vercors pour libérer ces Tirailleurs
Le 24 juin 1944, en fin de nuit, après avoir tué leurs 2 gardiens allemands, 52 tirailleurs (noms en annexe), aux ordres de VILCHEZE, rejoignent un détachement FFI qui les attend à proximité et embarquent dans 3 camions qui parviennent à quitter Lyon et à rejoindre le Vercors.
Réarmés les Tirailleurs furent affectés au 11ème Régiment FFI de Cuirassiers. Aux ordres du Lieutenant MOINE et du Sergent VILCHEZE, cantonnés à St AGNAN en Vercors , ils furent surtout utilisés à la garde du PC du Chef d’escadrons HUET dit « HERVIEUX » chef militaire du Vercors et du Chef d’escadrons GEYER , Commandant le 11ème Cuir.
(*)Terme d’usage pour désigner les soldats issus des différents pays de l’Afrique Noire française et non pas seulement du Sénégal.
13 Les actions opérationnelles.
Le 5 Juillet : renfort au col de Grimone, le 6 reconnaissance vers Nyons, le 10 couverture attaque d’un convoi ferroviaire à Crest
Le 13 juillet création de la « Section Franche de Tirailleurs sénégalais ».
A partir du 16/07 les Allemands encerclent et investissent le Vercors. Les Tirailleurs prennent position dans le dispositif au sein des éléments des 6ème et du 12ème Bat de Chasseurs Alpins. (défense du Pas de l’Ane et de la Sambue).
Relevés le 21 /07 , ils vont rejoindre le 11ème Cuir dans des conditions climatiques épouvantables, en 2 détachements. : le détachement Moine et le détachement JOUNEAU dit « Georges » .
a) Le détachement Moine,
recherché par les Allemands, parvient en forêt de Lente avec armes et munitions, sans être détecté.(Pendant plusieurs jours il se nourrit de baies sauvages, de pousses d’arbre et boit la nuit l’eau des ornières) . Ayant retrouvé le CE GEYER il assure la protection du PC à la ferme de Pelandré.
Le 30/ 07 attaqué par les Allemands il se replie en descendant par une corde une pente très raide. Les hommes restèrent toute une nuit attachés aux arbres par leurs ceinturons pour ne pas tomber dans le vide. Ils réussirent ainsi à échapper à leurs poursuivants.
b) Le Détachement « GEORGES »
défendait le secteur Sud Est du Vercors. Le 23/07 ses hommes participent efficacement, à la défense d’une position au sud du Grand Veymont, face à une attaque allemande appuyée par de l’artillerie… Le Général Pflaum reconnaitra « que son Groupe d’attaque avait rencontré une vive résistance ennemie » en ce point particulier.
A partir du 25 et pendant 10 jours, traqués, ils se replient à travers les positions ennemies. Fatigués, sans eau ni nourriture, sans informations, ils parviennent sains et saufs à la Croix du Lautaret.
c) Vers le 15 août,
les 2 détachements purent à nouveau se regrouper et constituèrent 2 sections aux ordres du Capitaine MOINE. Dans le cadre du 11ème Cuir ils participèrent à des actions de harcèlement des unités allemandes en retraite dans la vallée du Rhône.
Dans les deux détachements du Vercors, les Africains furent le plus souvent en position d’éclaireurs, donc en tête, car, bien que ne connaissant pas la montagne, leur qualité de pisteur de brousse s’avéra précieuse pour détecter la présence de l’ennemi ou pour lui échapper.
14 La libération de ROMANS et de Bourg de Péage.
GEYER ayant décidé d’attaquer ROMANS, le 22/08 les Tirailleurs participèrent à l’attaque de la ville défendue par une forte garnison allemande (180 à 200 hommes). Ils donnèrent l’assaut (garage CITROEN et Caserne BON), puis réduisirent des résistances dans le centre ville avec des hommes du maquis « BOZAMBO » et d’autres éléments du maquis. .
(Pertes françaises 7 soldats tués dont le Tirailleur SAMBA N’OUR.
Pertes allemandes 37 tués dont 3 officiers, 110 prisonniers et de nombreux blessés).
Accueil enthousiaste de la population qui se croit enfin libérée, lors du défilé du 11ème Cuir et des unités des maquis dans les rues de la ville, le 23 aout .
Le 27/08 les blindés de la 11ème Panzer reprennent la ville et s’y maintiennent jusqu’au 30 août . Ne pouvant s’opposer efficacement à eux, les unités du maquis se replient sous le feu, sans perte pour les 2 sections de Sénégalais.
Après la libération définitive de la ville le 30 /08, les Tirailleurs seront dirigés sur Lyon.
15 La libération de LYON.
Renforcés par des isolés de la 65ème Cie du GMICR, les Tirailleurs du Capitaine MOINE constituèrent désormais « l’Escadron sénégalais ». Ils prennent d’assaut le quartier de la Part Dieu solidement défendu.
2 prises d’armes clôturèrent cette phase de combats pour le 11ème Cuir : le 8/09 à Romans où le régiment est acclamé, et le 14/09 à Lyon en présence du Gal de LATTRE
En octobre 1944 en raison des mauvaises conditions climatiques et dans le cadre de l’opération « blanchiment », les Tirailleurs quittèrent le 11ème Cuir pour être dirigés sur HYERES, puis rejoignirent l’Afrique Noire que certains avaient quitté depuis plus de 5 ans.
Nota
Sur la fresque du Musée de la Résistance à VASSIEUX, au milieu des Chasseurs, Cavaliers et FFI se trouve un Tirailleur sénégalais …. Juste hommage rendu à ces Africains.
Annexes.
Liste des Tirailleurs.
Lors de l’évasion du Camp de la DOUA, le sergent VILCHEZE avait récupéré aux services administratifs de la 65ème Cie sénégalaise, une partie des dossiers des Tirailleurs évadés. Les documents détenus par le 11ème Cuir du Cdt GEYER, échapperont aux allemands lors de l’occupation du VERCORS. La liste des évadés a été établie par Jo La PICIRELLA , lui même présent le 23 juin lors de l’opération d’exfiltration des Tirailleurs de Lyon .
BAKIOU Bassane.
BIRAM Faye.
DIA MA DUNG.
DIARRA Boukary.
DIEMES Charles.
DIEYE Thiermo.
GOGUON GUYE Gilbert.
GORGAN Zoumanigui.
KAFALA Sanno .
KAMARA Mamoudou.
KEKOURA Baro.
KELY Guibo.
KI Soumaguon.
KINDA Diallo.
KITO Fayama.
KOLI Guilavogui.
KOMBA Célestin.
MAGA Diop.
MASSALA Robert.
MASSI Koulibaly.
METTOUA.
MOMARLO
MONABLO.
MOR M’Baye.
MOROU SALL.
MOUSSA Arouna.
N’DIAYE Laba.
N’ZAME Nize.
N’ZI BIKORO.
OLAI NEMA.
OUSMANN Cassana.
PANYO.
PEPE Dopavogui.
QUIVONGUI Ganoue.
SA Traoré.
SADIOUMA Kaïta.
SAMB N’Dour.
SAMBA Diallo.
SELA
SENE Diagane.
SIDI Konate.
SILATE Camara.
SOMA Denbadomo.
SUAN Billo.
SUAN Faye.
SUE BI Tidou.
TANOUE.
THIOR Salif.
TOLO Onivogui.
TUEB Tibou
WANIMO. BADA
ZIOUZOUHOUE
Bibliographie et Musées.
« La libération de ROMANS et de Bourg de Péage ». Sauvegarde du patrimoine Romanais-Péageois.
« Pour l’amour de la France » . Drôme – Vercors 1940 1944. Fédération des Unités combattantes de la Résistance et des FFI de la Drôme
« Guide Mémorial du Vercors résistant ». Patrice ESCOLAN , Lucien RATEL
« Témoignages sur le Vercors » . Dernière édition 1991 Joseph La PICIRELLA.
« Mon journal sur le Vercors » Joseph La PICIRELLA.
« VERCORS, Premier maquis de France ». Lieutenant STEPHEN
« Le Vercors raconté par ceux qui l’ont vécu ». Edité par l’association nationale des Pionniers et Combattants Volontaires du Vercors.
« Combattant du Vercors ». Gilbert JOSEPH.
« Héros méconnus ». Mémorial des combattants d’Afrique Noire et de Madagascar. Maurice RIVES et Robert DIETRICH.
Divers
Musée de la Résistance de VASSIEUX en VERCORS.
Musée de la Résistance et de la Déportation de ROMANS.